epee
L’épée chinoise selon le Dr Yang Jwing-Ming
L'épée est également communément traduite par « épée à lame étroite » car elle diffère du sabre en ce que la largeur de la lame est rétrécie, les deux bords sont tranchants et le manche et la lame de l'épée sont toujours droits.
De plus, la saillie métallique protégeant la main s'évase perpendiculairement à la lame au lieu d'être circulaire ou semi-circulaire comme avec le sabre, normalement la lame elle-même mesure un peu moins de 4 centimètres de large et est aiguisée de telle sorte que le premier tiers est extrêmement tranchant, le tiers du milieu moins tranchant et la section la plus proche du manche est émoussée
Les deux épées de base sont :
- l'épée de l'érudit (wen jian 文劎)
- l'épée martiale (wu jian 武劎
L'épée de l'érudit également connue sous le nom d'épée féminine (ci jian 雌 劎) est plus légère et plus courte que l'épée martiale ou masculine (xiong jian 雄 劎)
Une autre différence réside dans les pointes des épées, alors que l'épée féminine est arrondie, l'épée masculine a une pointe acérée. De plus, parce que l'épée martiale est beaucoup plus lourde que l'épée scolaire, l'épée martiale peut être utilisée comme arme de combat.
Pendant la dynastie chinoise Wu (222-265 av J-C.) un crochet a été ajouté près de la pointe de l'épée pour augmenter les techniques d'accrochage et le potentiel meurtrier. Les deux bords du crochet étaient tranchants, cette épée était appelée « l'épée à crochet de Wu » (wu gou jian 吳勾劎)
Il existe de nombreux autres modèles d'épées. En général, la longueur de l'épée utilisée par les artistes martiaux du Sud de la Chine était plus courte que celle des artistes martiaux du Nord. Cela était dû au fait que les artistes martiaux du Sud étaient spécialisés dans les techniques de combat à courte portée.
Les épées les plus rares comprenaient :
- l'épée à dents de scie à tête de serpent (ju chi jian 鋸齒劎)
- l'épée à langue de serpent (she she jian蛇舌劎)
- l'épée longue ondulée (bo chang jian波長劎)
Les bords dentelés du premier type lui donnaient l'apparence d'une lame de scie. Deux petits trous près de la pointe ressemblaient aux yeux d'un serpent et faisaient un bruit de sifflement lorsque l'épée était balancée.
La deuxième épée avait une lame incurvée, avec deux dents acérées au lieu d'une seule pointe pointue.
La troisième épée avait une lame ondulée pour augmenter sa puissance de glissement.
Les artistes martiaux considéraient l'épée comme la plus polyvalente de toutes les armes anciennes et l'appelaient le « roi des armes courtes » (duan bing zhi wang 短兵之王). Le tiers supérieur tranchant de la lame était capable de percer le corps d'un ennemi. La lame pouvait également être utilisée pour couper. La lame à dents de scie à tête de serpent avait un potentiel de coupe considérablement accru.
Les deux tiers inférieurs de la lame de l'épée servaient à bloquer l'arme de l'adversaire. La pièce évasée au sommet du manche pouvait également verrouiller la lame d'un adversaire. Cela différait de l'épée à lame large ou du sabre, qui était conçu pour faire glisser l'arme plutôt que de la verrouiller. Les dents de l'épée à langue de serpent servaient également à verrouiller l'arme de l'ennemi.
Le crochet de l'épée à crochet Wu était destiné à accrocher et à couper les bras ou les jambes de l'ennemi après avoir bloqué son arme. Le crochet complique les techniques de combat et augmente le potentiel meurtrier de l'arme. Cependant, l'inconvénient de l'épée à crochet était qu'elle ne pouvait pas être mise dans un fourreau.
Les techniques de combat à l'épée sont très compliquées. Ces complications proviennent de la coordination des jambes et du corps nécessaire à l'utilisation de l'épée comme arme défensive pour laquelle elle a été conçue.
Idéalement, un artiste martial ressemble à un phénix volant, s'envolant pour éviter une attaque. Ce n'est qu'en évitant et en bloquant que les opportunités se présentent pour poignarder ou couper l'ennemi.
Un artiste martial utilise souvent deux épées. L'une sert à bloquer, tandis que l'autre coupe ou poignarde. Ces épées sont originaires de la dynastie Huang Di (2697-2597 av. J.-C.).
Au début, il n'y avait que l'épée à lame courte et large (ou poignard), en pierre ou en jade. Lorsque les progrès métallurgiques se sont poursuivis, la lame a été plus tard fabriquée en laiton, puis en fer. La lame s'est améliorée en devenant plus étroite, plus longue et plus tranchante.
_____________________
Source : Ancient Chinese Weapons a martial artist's guide Dr Yang Jwing-Ming
Cet ouvrage est une véritable mine d'information sur les armes chinoises dans leur diversité
Sources photo : istockphoto.com
photo de l'auteur
Spécial épée
/image%2F1417047%2F20240908%2Fob_a00713_screenshot-20240529-104102.jpg)
Tout ou presque sur l'épée chinoise dans les articles ci-dessous
/https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FTm1toc-fjB8%2Fhqdefault.jpg)
57 Kunlun taiji jian (Yangjia michuan taiji quan) séquence 2
Séquence 2 épée kun lun partie 1 Exemple de vidéo proposée aux adhérents de l'Association Le Bambou, à l'origine pendant la période du Covid afin de conserver le lien et puis ensuite afin d...
/https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FRBikBpba3dg%2Fhqdefault.jpg)
Les trois parties de l'épée selon Dr Yang Jwing Ming
Description de la structure de la lame de l'épée chinoise, indication des techniques selon les différentes parties
LITTERATURE ET EPEE - ASSOCIATION LE BAMBOU HEROUVILLE SAINT-CLAIR (PRES DE CAEN) CALVADOS NORMANDIE
Les textes attribués aux taoïstes Lao Zi, Zhuang Zi et Lie Zi ont été écrits à des périodes troublées où la Chine cherchait son équilibre et son unité. On y trouve quelques textes sur le...
LITTERATURE ET EPEE
Les textes attribués aux taoïstes Lao Zi, Zhuang Zi et Lie Zi ont été écrits à des périodes troublées où
Dans le Dao De Jing, Lao Zi s’exprime de façon catégorique sur les armes ; selon lui, ceux qui se conforment au Dao ne se servent pas d’armes. Celui qui s’en est servi et a pu ainsi gagné la guerre ; le général en chef, doit se placer toujours selon Lao Zi à la droite de l’empereur ; cette place est celle du conducteur des deuils, il lui incombe de pleurer les morts.
Zhuang Zi afin que le roi Wen puisse prendre conscience de son erreur d’abriter chez lui des bretteurs, lui décrit trois types d’épée :
- l’épée du Fils du Ciel
- celle du feudataire (au service de l’empereur)
- celle de l’homme du commun (le bretteur)
________________________________
Le roi WEN, roi de Zhou aurait vécu aux alentours de 1000 av J.C, il interpréta les hexagrammes en donnant des conseils précis sur la conduite à suivre suite à la divination dans la partie du Yi Jing appelée « le jugement». On attribue à son fils le duc de Zhou le texte consacré aux traits des hexagrammes.
_______________________________
L'EPEE DE L'EMPEREUR
« …Qu’est-ce que l’épée de l’empereur ? demanda le roi [1]…C’est fit Tchouang-tseu[2], celle qui couvre tout à l’intérieur des quatre frontières, celle qui s’étend jusque sur les barbares limitrophes, celle qui règne des montagnes de l’ouest à la mer orientale. Suivant le cours des deux principes[3] et des cinq éléments, les lois de la justice et de la clémence, elle se repose au printemps et en été (saisons des travaux), elle sévit en automne et en hiver (saisons des exécutions et des guerres). A ce glaive tiré de son fourreau et brandi, rien ne résiste. Il force tout être à la soumission. C’est là l’épée de l’empereur… »
Cette épée symbolise la toute puissance de l’empereur exerçant justice mais aussi clémence sur ses sujets maintenant les barbares au delà des frontières.
L'EPEE DU FEUDATAIRE
« …Le roi Wen confondu demanda : à quoi ressemble l’épée du feudataire ? [4] C’est dit Tchouang-tseu, l’épée dont les braves représentent la pointe, les intègres le tranchant, les sages le dos, les fidèles la garde, le héros la poignée. Il n’y a rien qui tienne devant elle quand on la pousse d’estoc, ni au-dessus d’elle quand on la brandit. En haut, elle prend pour modèle le ciel rond et se conforme aux trois corps lumineux (soleil, lune et étoiles) ; en bas, elle prend pour modèle la terre carrée et se conforme aux quatre saisons ; au milieu, elle répond à la volonté générale du peuple et pacifie ainsi le pays entier. Quiconque se sert d’elle fera effet d’un coup de tonnerre. Tous les habitants d’entre les quatre frontières se soumettront aux feudataires et écouteront leurs ordres princiers. Telle est l’épée du feudataire… »
Elle symbolise la fidélité et l’allégeance des princes envers l’empereur et la magnanimité envers le peuple, Elle se modèle sur le ciel et la terre, sur les énergies célestes et les énergies terrestres. Sa force s’exprime par le tonnerre et impose le respect.
L'EPEE DU VULGAIRE
« …Et l’épée du vulgaire, qu’est-ce ? demanda le roi [5]…C’est dit Tchouang-tseu, le fer qui est aux mains de certains hommes, qui portent un turban à gland et un pourpoint étroit ; qui roulent des yeux féroces et ont le verbe très haut ; qui se coupent la gorge, se percent le foie ou les poumons, dans des duels sans buts ; qui s’entre-tuent, comme font les coqs de combat, sans aucune utilité pour leur pays… »
Elle symbolise les hommes qui tuent aveuglement, ils sont sans foi ni loi, exerçant leur courroux, bafouant les lois du ciel et de la terre.
Cette classification de trois épées décrit l’organisation féodale de
- l’empereur ou le roi ; tout puissant
- les princes feudataires soumis à l’autorité suprême possèdent les terres
- l’homme d’armes ou le soldat. Dans l’Antiquité chinoise c’était la plus basse classe sociale, celle permettant d’éviter la mendicité.
LE DISCOURS SUR L'EPEE DE ZHUANG ZI
Zhuang Zi était une fine lame ; dans son « discours sur l’épée » [6] il dévoile la subtilité de son art :
« …Mon art dit Tchouang Tseu consiste en ceci : je fais voir mon vide ; j’ouvre le combat en attirant mon adversaire par un avantage apparent ; l’attaque le dernier mais je touche le premier… »
On peut mettre en parallèle cet extrait du Zhuang Zi avec une note apportée par Wang yen Nien à un texte de taiji quan ; « les secrets des cinq principes » de Li Yixu. Li Yixu expose la primauté de l’intention (le Yi) sur l’usage de la force. Wang Yen Nien ajoute cette note :
« Si l’autre bouge, je bouge aussi, mais le premier »
On peut voir l’importance de l’observation, du regard intérieur qui peut pénétrer l’autre et ainsi sentir ses moindres mouvements et pouvoir ainsi le devancer dans ses actions. La condition première selon Li Yixu demeure le calme de l’esprit, la pensée (Yi) dirige et non pas la force (jin).
A la fin de l’Antiquité apparaît une nouvelle classe sociale importante qui va marquer
LE WEN ET LE WU
Ces deux termes ne s’opposent pas bien qu’on puisse le croire au premier abord, comme le yin yang, ils se complètent. Ils semblent avoir influencer les arts chinois, subtil équilibre entre la force et l’esprit.
LE WEN
WEN
|
(Ricci 5535 ; lignes, dessins, veines dans le bois ou la pierre, idéogrammes simples, caractères, pièce écrite, culture, cultivé, civil en opposition à militaire) |
(Wieger |
Le caractère représente l’écriture, les écrits sont tellement importants en Chine qu’ils ont pu pour certains été considérés comme des « classiques » ceux-ci constituent la base de l’éducation des lettrés chez qui l’influence confucéenne est très marquée. Les lettrés constituaient une classe sociale de fonctionnaires civils de l’état. Ils possédaient une qualité, celle de l’écriture au service de l’état permettant d’imposer les lois dans l’empire. Le symbole de cette qualité était représenté par le droit du port d’une épée par ces lettrés, celle-ci était qualifiée de « civile » afin de la distinguer de l’épée dite « militaire ».
LE WU
WU 武 |
(Ricci 5587 ; militaire par opposition à civil, martial, guerrier, traces de pas, pas, enjambée) Ceci nous donne l’image d’une armée en marche prête à combattre. |
Pourtant l’étymologie de l’idéogramme WU apporte une nuance importante au sujet de l’utilisation des armes.
WU 武 |
Les lances
![]() ![]() |
(Wieger 71 K) L’armée, soldats. |
Traduction littérale ; arrêt de la violence donc la paix permettant au peuple de vivre et de prospérer. Les armes font office de protection, elles enlèvent à l’ennemi potentiel toute velléité, elles garantissent la paix. Ce qui impose ce respect est pourtant un des instruments de guerre des plus redoutables ; KE, la hallebarde.
LA HALLEBARDE
![]() KE |
(Wieger |
Ce radical (le 62 dans le dictionnaire antique Kang Xi) est à l’origine de nombreux caractères ayant trait aux armes, excusez du peu !
- lance
- hallebarde
- armes
- trident
- pointe
- bouclier
- hache
- glaive
- pieu
- flèche
- longue lance
et aussi aux techniques en rapport avec celles-ci :
- blesser
- planter
- racler
- tailler
- vaincre
- désarmer
- trancher
- détruire
- mettre à mort
- combattre
- percer
La vocation de l’armée est d’imposer par les armes en garantissant la paix. L’association des idéogrammes WEN WU signifie civilisation, patrimoine culturel d’un pays (Ricci 5535) La culture, les arts se développent en période de paix, l’usage des armes est d’imposer l’ordre permettant le développement de la société.. La civilisation sans la culture et les lettres peut pencher vers la barbarie. Les deux tranchants de la lame de l’épée pourraient symboliser les domaines du WEN et du WU, alliant la force et l’esprit, la force étant dirigée par l’esprit.
____________________
[1] P481 Les pères du système taoïste L.Wieger
[2] Zhuang Zi
[3] Le yin et le yang
[4] P332 333 Philosophes taoïstes Gallimard
[5] P481 Les pères du système taoïste L.Wieger
[6] P331 L’oeuvre complète XXX Philosophes taoïstes Gallimard
______________________
SOURCES :
Caractères chinois L.Wieger
Chine J.Pimpaneau
Découvrir les anciennes armes de
Dictionnaire français de la langue chinoise Institut Ricci
Les pères du système taoïste L.Wieger Cathasia
Philosophes taoïstes Gallimard
A LIRE :
Revue Dragon n°7 Jian ou l’épée chinoise Y.Naert
____________________