Les huit portes : thème du stage du 24 25 mai 2008 par C.JEANMOUGIN
(provient du blog du GRDT voir liens)
" Les 8 Portes sont les 8 mouvements de mains de base du Tai Ji Quan (Peng, Lu, Ji, An, Cai, Lie, Zhou, Kao). Associés aux 5 déplacements possibles (avant, arrière, gauche, droit, centre), cela donne la forme dite des « 13 Postures » que l’on retrouve dans différentes écoles. Claudy Jeanmougin nous proposera un stage sur le thème « D’une Porte à l’autre-Transformations ». Voici ce qu’il en dit :
Porte
Lors de la traduction des HUIT POSTURES du petit livre rouge de Maître Wang, nous avons commis la grave erreur de traduire RU MEN de Chuxue rumen taiji quan par : “Apprentissage des huit portes du Taiji quan”, faisant ainsi une grave confusion entre Ba et Ru ..
Si Bamen veut bien dire les huit portes, le sens de Rumen est : débuter, initiation, introduction, rudiments, entrer par une porte. .Ce terme, Porte, est un bon contenant par rapport aux différents sens de Rumen. Pour ouvrir une porte, il faut avoir la clef, et il semble bien que la clef soit Rumen, une sorte d’initiation qui nous donnera le secret de la combinaison pour franchir la porte. Ensuite, il faut l’ouvrir et, une fois ouverte, une autre se présente, c'est-à-dire qu’il faut pénétrer un autre stade de pratique . Les huit gestes de mains ont donc un secret à percer, secret qui se dévoilera progressivement.
Rappelons que chaque geste de la forme peut être décomposé à partir des huit portes qui se succèdent, se répètent, en un ordre préétabli pour constituer un tout cohérent-la forme-qui représente une sorte de “corpus” de la discipline, une référence à laquelle il faudra toujours revenir.
Notre quête au cours de ce stage va consister à percer une partie du mystère de ces huit portes à travers le jeu de ce que je nomme Transformation.
Transformation
Ce que j’appelle transformation est le passage d’une porte à une autre, c’est-à-dire la génération gestuelle qui permet qu’un geste prenne fin alors qu’un autre débute sans qu’il y ait la moindre rupture tant au niveau des souffles (énergies) que des arabesques gestuelles.
Au niveau énergétique je pense qu’il s’opère une transmutation, au sens alchimique du terme, durant le passage du Yin au Yang et vice versa. La bascule ne peut se faire que si l’un contient en germe l’autre, comme si l’autre appelait la transformation. La moindre erreur créée la rupture du flux qui génère automatiquement l’à-coup gestuel et la perte de la fluidité. Ce que nous venons de dire pour une porte est aussi vrai pour le passage d’un geste de la forme à un autre. La fin d’un geste contient en germe le début du geste suivant qui peut subir une transformation par le jeu de succession des portes. Du fait de “l’ouverture” des portes vers d’autres portes, les gestes générés peuvent être multiples.
Parfois, dans la pratique de la forme, il n’est pas rare de “se tromper” quand toute l’attention n’est pas présente, c’est-à-dire qu’on enchaîne un geste qui n’est pas celui prévu par la forme. Mais est-ce bien une erreur? Ne serait-ce pas justement le constat de la richesse des transformations des portes?
Je me suis toujours demandé si un geste dans l’espace pouvait être perçu dans sa contingence comme la succession de postures à l’image de celle d’un film pour lequel il est possible de visionner chaque plan successif. En d’autres termes, est-il possible que le passage d’un plan à un autre, aussi rapide soit-il et pourquoi pas à la vitesse de la lumière, procède à une déstructuration totale de la structure corporelle pour une reconstruction dans un autre plan? Je pense à une réorganisation permanente des structures-formes sous-tendues par un continuum énergétique. La rupture du continuum énergétique, ou le défaut de fluidité du flux, provoquerait justement la déstructuration ou, au moins pire, la déstabilisation de l’organisation de la forme-structure de notre ensemble psycho-corporel.
De ce fait, le passage d’un geste à un autre, dans le travail de la forme, me semble plus fondamental que la réalisation du geste lui-même.
Cette observation conduit aux remarques suivantes :
-dans l’exécution de la forme ce qui est fondamental ce n’est pas le geste lui-même, mais l’induction qui fait que ce geste se réalise.
- quand la forme est connue, l’attention doit être portée non sur la succession des gestes mais sur la “préparation” de chacun des gestes, le geste n’étant que la résultante de cette préparation.
Les corollaires directs de ces remarques sont :
-puisqu’un geste de la forme est déjà une succession de portes, c’est le passage d’une porte à une autre qui doit faire l’objet de toute l’attention;
-tout geste constitué de plusieurs portes peut subir une transformation dans son exécution sans que les principes de la discipline soient trahis.
De ce fait :
-le travail des applications des gestes ne peut en aucun cas se limiter à des stéréotypes qui sont bien souvent destinés à mettre en place la forme.
-quand les principes sont bien respectés, les portes peuvent s’enchaîner les unes après les autres dans un ordre qui ne correspond pas forcément aux gestes de la forme.
La transformation semble donc bien être l’instant où nous subissons, d’une façon plus ou moins consciente selon le degré de pratique, une transmutation énergétique qui permet le flux régulier des énergies avec toutes les conséquences que cela entraînent tant au niveau du maintien de l’intégrité de la structure corporelle, de la santé mentale, de l’entretien des potentialités et de leur mise en valeur. Le reste du geste, sa partie la plus visible n’apparaissant que comme une sorte de gymnastique d’entretien de ce qui a été induit.
Durant le stage nous suivrons donc le plan suivant :
La base de notre travail sera la forme et nous commencerons par apporter les corrections d’erreurs qui nous semblent trop éloignées des Principes Essentiels qui gouvernent notre discipline. Dans ce travail de corrections nous tiendrons compte de l’avancement de chacun dans la forme. Il va de soi qu’une correction à partir d’un Principe aura une répercussion sur l’ensemble de la forme.
Puis, nous passerons en revue différentes modalités :
-Réflexion sur le nom du geste :
Bien souvent le nom décrit le geste ou en donne l’image, d’autres fois, il semblerait qu’il y ait une signification qui nous échappe; c’est dans ce cas que nous nous laisserons aller à quelques...divagations.
-Décomposition du geste.
Nous décomposerons le geste en autant de portes qu’il comporte. Lors de cette décomposition nous tenterons de faire apparaître les générations d’une porte à une autre.
-Génération d’un geste ou d’une porte cachée.
Comment sortir de l’intérieur d’un geste à partir d’une porte pour générer un autre geste, ou une autre porte, tout en respectant les principes fondamentaux du Taiji quan. Cet aspect m’est très cher car il nous montre toute la richesse de notre discipline dans son inépuisable pouvoir de créativité.
-Différentes modalités d’application de la génération du geste.
Nous profiterons de ce temps pour sortir des sentiers battus et offrir quelques perspectives. Evidemment, ce qui sera dit dans ces lignes sera transposable à n’importe quel autre geste de la forme.
Enfin, nous porterons attention aux changements intérieurs que le passage d’une porte à l’autre peut déclencher, soutenir ou parachever, générant une sorte d’alchimie interne en mouvement."
A LIRE SUR LES PORTES :
YANGJIA MICHUAN TAIJI QUAN TOME 1 éditeur Ecole française de taiji quan p 118 à 169
YANGJIA MICHUAN TAIJI QUAN TOME 1 éditeur Ecole française de taiji quan p 125 à 175